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Le thérapeute est-il un être humain parfait?

24/2/13

Lorsque l'on est en psychothérapie, il est commun de considérer son thérapeute comme un homme (ou une femme) particulièrement accompli et sage. On lui reconnait une autorité en matière de conseils sur comment mener sa vie, comment gérer ses relations, quelles décisions prendre le cas échéant.
C'est un des effets du transfert, dont j'ai parlé dans un article précédent.
Parfois, lorsque nous sommes amenés à croiser notre psychothérapeute dans d'autres occasions que le lieu clos où se déroule la thérapie, nous sommes surpris d'avoir en face de nous un être qui semble aussi humain que nous, qui a des goûts et des dégoûts pas forcément justifiés, des opinions qui ne nous paraissent pas si inspirées par la sagesse que cela, des faiblesses voire des larmes. Je me souviens avoir moi-même été très déçue de constater que ma thérapeute aimait regarder la télévision (et pas forcément des émissions très intellectuelles) alors que je n'ai pas une très haute opinion de ce média. Je suppose que je m'imaginais qu'elle passait son temps à lire des livres, réfléchir, méditer, écrire - rien que des "nobles" tâches, et qu'elle n'avait pas besoin de se détendre comme tout un chacun!
Le psychothérapeute est un être humain "normal"; il n'a rien de supérieur aux autres. Ses besoins sont les mêmes : il mange et boit, va aux toilettes, doit exercer un minimum d'activités physiques, etc. Il a des goûts, des goûts personnels, qui ne sont pas dictés par la Sagesse ou la Connaissance, mais par sa nature humaine. Il a des opinions, controversables, et des émotions, qu'il ne maitrise pas forcément. Il a une affectivité aussi, il aime, il déteste parfois. Il a souvent une famille, des enfants, et n'est pas forcément exempt de reproches avec eux malgré sa connaissance de la psychologie et du développement de l'enfant.
Sa vie n'a rien d'un modèle.
Ses patients n'ont pas à développer un complexe d'infériorité par rapport à lui.
Le seul atout qu'il a par rapport à ses patient est qu'il a fini sa thérapie, et qu'il sait qui il est. Il est apaisé de ce côté-là, ce qui le rend plus disponible pour guider les autres vers ce qu'ils sont eux-mêmes. Lui ne le sait pas, mais a une idée du chemin qu'il leur faudra emprunter pour le découvrir, et il peut les guider.
Souvent, mes patients sont avides de conseils : dois-je quitter mon mari, dois-je changer d'emploi, comment je pourrais ne plus avoir peur de parler en public, etc. Je ne peux leur répondre. La réponse est en eux, et c'est à eux de la trouver. Ils sont fréquemment déçus de ma réponse, mais j'ajoute que je peux les guider à aller trouver cette réponse en eux. Le chemin est plus escarpé, semble moins aisé, que celui qui permettrait d'obtenir une réponse toute cuite de l'interlocuteur, mais il est plus fiable pour la personne. Elle seule peut savoir ce qui est bon pour elle.
La thérapie bioanalytique est une méthode non directive, ce qui signifie que ce n'est pas le thérapeute qui agit, c'est le patient. Le thérapeute l'accompagne, le guide éventuellement l'enveloppe de bienveillance, le protège s'il se met en danger, mais ce n'est pas lui qui va dicter la conduite à adopter ou le choix à effectuer. Il refuse le pouvoir sur la vie de l'autre.

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