Qu'est-ce qu'une vie réussie?
La question s'est imposée à moi à l'écoute d'un hommage rendu lors du décès d'une personnalité : « on peut dire qu'elle a réussi sa vie ». Cette phrase m'a interpellée même si, bien sûr, je ne découvre pas ce concept. Elle suscite pour le moins la réflexion.
Il semblerait donc qu'il y ait des vies réussies – et donc, par déduction, d'autres vies qui ne le sont pas. Pourrait-on même aller jusqu'à parler de vies ratées ?? Sur quels critères peut-on jauger de la « réussite » ou du « ratage » d'une vie ? Chacun de nous aurait-il à sa naissance des objectifs qui, si ils sont atteints ou non, attesteraient ou non de cette réussite ???
Cela paraît bien simpliste au regard de la complexité de la vie elle-même et du déroulé souvent incontrôlable de celle-ci. A moins de croire à une puissance divine qui nous donnerait une mission lors de notre incarnation et nous sommerait de la mener à bien – auquel cas, elle seule pourrait juger de la réussite ou non de cette vie ; cela échappe à notre jugement humain.
Il me semble, à mon humble niveau, qu'une vie « réussie » est une vie qui a été vécue avec toutes les complexités de l'humanité. Etre humain, dans toutes ses dimensions, ressentir aussi bien les besoins basaux (ceux de sécurité, de nourriture, de repos, de sexe, etc.) que sociaux ou spirituels, éprouver les émotions, visiter toutes les facettes de ce qu'être humain signifie.
Une vie « réussie » est une vie qui a été vécue. Il n'y a pas de critères moraux ou religieux à ajouter, ni même de critères de bonheur. Une vie réussie n'est pas forcément une vie heureuse. L'humanité à vivre n'est pas un Eden permanent.
Notre vie se déroule comme un chemin. Sur celui-ci, sans que cela n'interfère dans la notion de réussite ou non, peuvent se présenter des opportunités qui améliorent ou détériorent la qualité de celui-ci. Parmi ceux qui l'améliorent, il y a l'amour. Aimer, au sens large du terme, est sans doute une des forces qui nous aide à vivre, qui fournit l'énergie pour que l'on puisse marcher sur cette route, qui nous soutient et nous conduit. Il y a aussi cette forme d'énergie qui vient de l'élan créatif, ou plus simplement du fait de faire ce que l'on aime « de toute son âme », de tout son cœur, que ce soit jouer d'un instrument de musique, recevoir des amis, jardiner, écrire, peindre, faire du sport, décorer sa maison pour Noël, etc. Et puis, il y a aussi la connaissance de soi-même qui passe par un travail sur soi : l'introspection, l'accueil de nos parts inconscientes, l'analyse de nos pas sur ce chemin de la vie...
Il s'agit là d'enrichissement personnel. Mais pas plus que les richesses matérielles (du type Rollex à 50 ans), le fait d'avoir fait ou non une psychothérapie ou une psychanalyse ne témoigne de la réussite ou non de la vie. A mon sens, la thérapie aide à vivre, allège de certains fardeaux, soulage certaines souffrances, libère de l'énergie, nous enrichit d'une meilleure connaissance de nous-mêmes et des autres, mais n'est en aucun cas un critère de vie réussie.
Toutes les vies sont des vies réussies.
Il n'existe pas de vies ratées.
Il n'existe que des vies vécues.
Nous parlerons une autre fois du sens de la vie. C'est un autre sujet.
